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    CRITIQUE LITTÉRAIRE
    La Chambre Ardente - John Dickson Carr




    Critique publiée par Woland le 27-08-2005

    Pour les amateurs de romans policiers, Dickson Carr demeure le maître incontesté de l'énigme dite "de la chambre close." Et, à ma connaissance du moins, il n'a jamais oeuvré dans le genre "épouvante." Pourquoi, dans ces conditions, mets-je alors "La Chambre Ardente" dans cette section ? Parce que, de son début : "Il était une fois un homme qui habitait près d'un cimetière ..." jusqu'à son épilogue, ce roman introduit bel et bien dans une classique histoire policière les notes subtilement discordantes d'un surnaturel sur lequel le lecteur, arrivé en bout d'énigme, s'interroge encore.

    Tout commence dans un train de la banlieue de Philadelphie où Tod Stevens, lecteur d'une grande maison d'édition, a la stupeur de découvrir, glissée dans un manuscrit original, la photo d'une femme qui, bien que datée des années 1850, lui restitue les traits, le port, l'allure exacts de sa propre épouse, Marie d'Aubray, une Québéquoise. Le manuscrit, signé d'un spécialiste au nom étrange, Gaudan Cross, traite des meurtres célèbres par empoisonnement. La photo est celle d'une autre Marie d'Aubray, française celle-là, qui empoisonna son amant, Louis Picard, en usant de l'arsenic.

    Arrivé chez lui, Stevens - et on le comprend - ne peut s'empêcher d'aborder le sujet avec sa femme. Mais un coup de sonnette l'interrompt : un vieil ami à lui, Mark Despard, qui avait déjà cherché à le joindre par téléphone, s'annonce et lui conte à son tour une incroyable histoire.

    A la suite du décès de son oncle Miles, mort d'une gastro-entérite, des rumeurs n'ont pas tardé à courir le village voisin, comme quoi le vieil homme aurait été empoisonné à l'arsenic. Qui pis est, la propre gouvernante de Despard Park - où Mark, son épouse Lucy, sa soeur Edith et leur frère Ogden vivaient auprès du défunt - lui a rapporté que, le soir de la mort du vieux monsieur, alors qu'elle écoutait une émission radiophonique dans la véranda attenant à la chambre de son employeur, elle avait été étonnée d'entendre des bruits de voix. Il était onze heures du soir et, à l'exception d'elle même et de Miles Despard, la maison était vide puisque les quatre jeunes gens s'étaient absentés, les trois premiers pour se rendre à un bal costumé, le quatrième pour rejoindre des amis.

    Intriguée, Mrs Henderson - la gouvernante - s'était alors levée et avait cherché à voir qui se trouvait avec Mr Despard dans sa chambre. Par la fente d'un rideau qui protégeait une porte vitrée donnant dans la pièce, elle avait eu la surprise d'apercevoir, debout face au lit du malade, une femme de petite taille et revêtue d'une robe similaire à celle que portait Lucy Despard pour se rendre au bal, une robe de soie rouge et bleu, copiée sur un modèle du XVIIème siècle lui-même porté par une femme au visage méconnaissable sur l'un des portraits situé dans la galerie du manoir.

    Autre fait qui avait intrigué et même effrayé la gouvernante : il semblait que la tête de la femme flottât au-dessus de son cou. Face à elle, Mr Despard semblait littéralement terrifié. Enfin, last but not least, la femme s'était éclipsée en passant par une porte dérobée creusée dans l'un des murs de la chambre.

    A partir de là, tout s'emballe : dans la crypte familial, où Stevens accompagne son ami, le cercueil et son contenu se sont volatilisés ; de mystérieux télégrammes parlant d'empoisonnement et d'enquête policière sont adressés à droite et à gauche, ramenant au manoir Lucy et Edith, qui s'étaient absentées pour la quinzaine et l'infirmière qui avait soigné Miles Despard. Mais il y a pis : un lieutenant de police, Brennan, est dépêché à Despard Park par ses supérieurs, lesquels ont également reçu un télégramme où un mystérieux Amor Justitiae dénonce l'assassinat de Miles Despard ...

    Je ne vous dirai rien de la fin de ce curieux roman, hormis que, à une première conclusion des plus rationnelles, elle fait succéder un épilogue pour le moins ambigu. Mais comme il s'agit là d'un roman d'avant-guerre - l'action se situe l'année du grand krach - ne vous attendez pas à y trouver les outrances sanglantes des romans noirs ou terrifiants d'aujourd'hui. Tout y est subtil, insidieux et étouffant.

    Un véritable empoisonnement.

    PS : si vous avez aimé "La Chambre Ardente", ainsi nommée en référence à la cour de justice qui oeuvra à huis-clos dès 1680 pour traiter le scandale des Poisons à la cour de Louis XIV, je vous conseille notamment, du même auteur, "Celui qui murmure ...", autre meurtre étrange, au haut d'une tour. L'ambiance y est aussi glaçante mais la solution de l'énigme ne fait pas par contre appel au surnaturel. J'ajouterai que, comme tout auteur, Dickson Carr, qui créa entre autre le personnage du Dr Gedeon Fell, eut des hauts et des bas : sa "Main de Marbre" par exemple est fort mal écrit.

    Une petite biographie de l'auteur :

    http://www.polars.org/article17.html


    Le critique : Woland
    Note :
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