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    CRITIQUE LITTÉRAIRE
    Frida - Heyden Herrera




    Critique publiée par Woland le 29-06-2006

    Certaines vies semblent vouloir nous apporter la preuve flagrante de l’existence d’un Destin surhumain, à la fois omniscient et omnipotent mais dont les voies demeurent jusqu’au bout froidement impénétrables et terriblement injustes à quiconque le subit.

    Il en est ainsi de la vie de Frida Kahlo dont André Breton – qu’elle n’aimait guère pourtant - déclara qu’elle était « surréaliste sans le savoir. »

    Elle naît en 1907 d’un père immigré d’origine judéo-allemande, Wilhelm (plus tard mexicanisé en Guillermo) Kahlo et de la seconde épouse de celui-ci, Matilde Calderon, dont le sang unissait la fierté du Siècle d’Or espagnol à celle, si ancienne, des Indiens d’Amérique centrale.

    Son enfance passerait pour peu révélatrice si, dès ses huit ans, le Destin ne s’en venait frapper à sa porte pour lui laisser en dépôt une poliomyélite qui marquera à jamais sa jambe droite. Ces longues jupes de tehuana qu’elle se complaira à arborer jusque sous les cieux de Detroit et de Paris, Frida les porte avant tout pour dissimuler cette jambe éternellement malingre dont elle a honte.

    Et puis, dix ans plus tard, le 17 septembre 1925, le second coup de trompette de la Fatalité résonne de façon bien plus discordante, mille fois plus cruelle : le bus dans lequel se trouvait la jeune fille rentre dans un tramway et l’une des barres d’appui l’empale littéralement, provoquant de graves lésions au niveau du bassin et de la colonne vertébrale. A partir de cet instant, le sort de Frida Kahlo – et celui de son œuvre – sont scellés.

    Tout d’abord, elle ne pourra jamais porter un enfant à terme. Ensuite, immobilisée pour de longs mois dans son lit, elle commence à peindre. Mais elle ne sait pas encore que les seuls enfants auxquels elle pourra donner vie seront exclusivement spirituels : les médecins, peut-être sincères d’ailleurs à l’époque, la laissent espérer des grossesses où la césarienne finale constituerait la seule anormalité.

    De fait, elle tombera enceinte de son mari, le peintre Diego Rivera, l’une des gloires du Mexique contemporain, de 20 ans son aîné. Plus tard, quand elle tentera de se venger de ses infidélités chroniques, elle portera également l’enfant de l’un de ses amants. Mais peu importe l’homme en cette affaire : si, par l’un de ces raffinements de cruauté auxquels la Vie nous habitue, les lésions infligées à l’utérus par l’accident de 1925 n’empêchent en rien la fécondation, elles rendent par contre toute naissance impossible.

    Ce leit-motiv de l’avortement naturel ou encore de l’accouchement qui se déroule mal réapparaît dans nombre de toiles de Frida Kahlo. Et pour se convaincre qu’elle le vécut comme une malédiction, il suffit de regarder « Ma Naissance », où elle a représenté sa propre venue au monde dans son style si particulier, mélange de peinture naïve fondée essentiellement sur les retablos (ex-votos) pendus dans les églises et l’art pré-colombien aztèque.

    Autre thème favori de l’artiste : le double - soulignons à ce sujet la bisexualité de Kahlo. L’œuvre regorge d’auto-portraits qui nous restituent ses joies mais aussi ses malheurs, comme l’ « Autoportrait aux cheveux coupés » qu’elle peignit alors que Rivera venait de demander le divorce après lui avoir probablement dit (il en parle dans ses mémoires) qu’il ne la désirait plus et que ses infirmités y étaient pour beaucoup.

    Et bien sûr, omniprésente, la Souffrance. Souffrance d’un corps martyrisé (« La Colonne Brisée » touche en ce sens à la perfection), souffrance d’un instinct maternel profond qui ne trouva jamais à s’épancher sur sa propre chair et son propre sang, souffrance d’une femme amoureuse à la folie d’une espèce d’homme-enfant, souffrance d’une artiste qui voulait faire « du grand, du social, comme Diego » et qui douta toujours de la valeur de son œuvre.

    Doit-on pour autant, quand on évoque la peinture de Kahlo, parler de tristesse ou de malheur ? Certainement pas, à moins qu’on soit borné ou d’une sottise remarquable. Il y a de l’allégresse dans ses toiles, même si elle est souvent féroce et cruelle, même si l’on y croise souvent des squelettes attablés ou dansants, des organes ou des membres écorchés et sanglants et, dans le superbe tableau « Moi et ma Nourrice », une nourrice indienne affublée d’un masque d’idole antique plus noir et plus fermé que la Terre.

    Si Breton est dans le vrai quand il évoque ici l’idée de surréalisme, il faut cependant préciser que Kahlo ignorait tout de ce mouvement quand elle se mit vraiment à peindre. Ses premiers inspirateurs, outre ceux, fondamentaux, que j’ai cités plus haut, sont certainement l’école italienne moyen-âgeuse et des francs-tireurs comme par exemple Henri Rousseau, dit « le Douanier Rousseau), pour lesquels elle a souvent avoué sa très grande admiration.

    Mais quel que soit le qualificatif que l'on veut donner à ses toiles, on s'empresse tout d'abord d'en souligner l'incroyable force qui s'en dégage. Puissance et cruauté, blessures sanglantes et impardonnables, fascination pour une Mort qui n’est que la continuation de la Vie se mêlent ici à un sens très sûr de la dérision et de l’auto-dérision ainsi qu’à un mysticisme inné.

    Un proche à qui je montrais des reproductions des toiles de Frida m'a dit : "Elle peignait comme un homme !" Ce en quoi il n'avait pas tort. Mais, peut-être parce que lui-même était un homme, il avait du mal à admettre que toute cette violence, Frida Kahlo était parvenue à la domestiquer au service d'émotions intimement féminines : le désespoir de ne pouvoir mener un bébé à terme, la soumission, l'éternelle soumission de la sensibilité et du corps féminins à un univers dominé par l’égoïsme masculin et, antique et profond paradoxe, la subordination de la Nature à la Féminité, à l'Eau.

    C’est tout cela, et bien plus, que vous raconte, avec beaucoup plus de talent que moi, Hayden Herrera dans sa « Frida – Biographie de Frida Kahlo », désormais paru en Poche, un livre qui ressemble à un pavé mais qui se dévore presque d’une traite tant son héroïne, par delà la Mort, nous apparaît proche de nos émotions et de nos rêves. L’impression se trouve renforcée par les citations des lettres de Kahlo à ses familiers et aussi par une analyse soignée et jamais pédante de ses toiles – dont beaucoup sont reproduites en hors-textes.


    Le critique : Woland
    Note :
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